Texte intégral du discours de M. Youssef Amrani au Conseil de sécurité ( New York) - Youssef AmraniYoussef Amrani

Texte intégral du discours de M. Youssef Amrani au Conseil de sécurité ( New York)

 

Ma délégation voudrait tout d’abord, souhaiter la bienvenue à Son Excellence le Président FAURE GNASSIMBE, qui a tenu à rehausser, par sa présence et sa participation, cette séance du Conseil de Sécurité.

Je voudrais également remercier, au nom du Royaume du Maroc, le Togo pour avoir pris l’initiative d’organiser un débat sur une thématique de grande importance pour la région ouest africaine et sahélienne ainsi que pour l’ensemble du Continent Africain.

Nous tenons également à remercier le Togo, pour la programmation, le 27 février 2012, d’un débat public pour discuter du rapport de la mission d’évaluation des Nations Unies qui s’est rendue dans les pays du Golfe de Guinée ainsi que pour son engagement marqué à défendre les intérêts africains au Conseil de Sécurité. Ce prochain débat permettra de compléter, en plus des discussions d’aujourd’hui, et celle du mois précédent sur la région du Sahel, la perspective générale de la situation en Afrique de l’Ouest, une région qui nous est chère, et avec laquelle mon pays partage des liens séculaires.

Je voudrais aussi remercier le Secrétaire général Monsieur Ban Ki-Moon, et le Directeur exécutif de l’Organisation des Nations Unies contre le Crime et la Drogue (ONUDC) Monsieur Yuri Fedotov pour leur présence et contribution à ces discussions.

Le Maroc estime que ce débat public du Conseil sur la question du crime transnational organisé et de son impact sur la paix et la sécurité en Afrique de l’Ouest et du Sahel est particulièrement d’actualité et tombe à point nommé, à la lumière des menaces qui se développent dans la région depuis plusieurs années.

Le crime transnational organisé représente un réel défi à la stabilité des espaces ouest africains et sahéliens, menaçant la souveraineté des Etats et l’ensemble des efforts visant à consolider la paix ainsi que le développement de cette région. Le crime transnational organisé a notamment connu, au cours de ces récentes années, des évolutions et des mutations dangereuses particulièrement au niveau de ces régions.

Celles-ci se retrouvent à faire face à des défis de plus en plus complexes, provenant notamment du trafic de drogues et de l’émergence d’une nouvelle génération de crime transnational organisé, caractérisée par des actes de grand banditisme, de piraterie, de vols à main armée en mer et de terrorisme.

L’ensemble de ces réseaux criminels s’entremêlent et se nourrissent de plus en plus les uns des autres, mais aussi, se mondialisent, augmentant ainsi leur capacité de nuisance et leurs effets déstabilisateurs. De même, le lien et l’interconnexion de plus en plus apparents entre le crime transnational organisé et les groupes armés, mouvements séparatistes ou groupuscules terroristes dans la région est une source d’inquiétude à laquelle la Communauté internationale se doit de prêter plus d’attention.

Face à ce constat alarmant, le Conseil de sécurité a examiné,notamment au cours de ces trois dernières années, différentes facettes du crime transnational organisé en Afrique, notamment en Afrique de l’Ouest et au Sahel.

Au niveau de l’Afrique de l’Ouest, des initiatives louables et importantes ont été lancées au niveau national, régional et sous-régional dont notamment l’adoption du Plan d’Action de Praia contre le narcotrafic, le Plan d’Action régional de la CEDEAO ainsi que l’« Initiative Côte » de l’Afrique de l’Ouest. Aujourd’hui, une nouvelle approche est en train d’être élaborée entre la CEDEAO, la CEEAC et la CGG pour combattre les défis émergents au niveau du Golfe de Guinée.

De part son positionnement géographique, son expérience dans la lutte contre le crime transnational organisé, et en réponse aux défis posés par le trafic transatlantique de drogue et la piraterie dans le golfe de guinée, le Maroc a pris l’initiative de rassembler, en août 2009, 22 pays africains du Détroit de Gibraltar au Cap de Bonne Espérance, et dont trois d’entre eux, siègent par une heureuse coïncidence, ici même,au Conseil de Sécurité. Cette initiative a donné lieu à l’établissement de la Conférence Ministérielle des Etats Africains Riverains de l’Atlantique.

Cette Conférence a été conçue comme une plateforme rassemblant tous les pays riverains concernés pour faire front commun contre les défis émanant de l’Océan Atlantique à travers un mécanisme de coopération et de coordinationsouple et flexible, libre des lourdeurs institutionnelles, et surtout, complémentaire avec les initiatives déjà existantes.Compte tenu de sa nature transrégionale, elle ambitionne aussi de faciliter les synergies inter-régionales entre les différentes organisations présentes dans cet espace traitant des questions de sécurité, mais aussi, de la connectivité, de l’économie de la mer et de l’environnement.

A cet égard, je voudrais indiquer que la première réunion des Ministres en charge de la sécurité de cette Conférence est prévue prochainement, dont l’objectif est d’évaluer les moyens de mettre en œuvre le pilier sécurité du Plan d’Action, adopté à Rabat, en Novembre
2010, œuvrant à renforcer et à fluidifier la coopération sécuritaire, policière et judiciaire ainsi
que les échanges d’informations et de renseignement au sein de cet espace pour combattre le crime transnational organisé.

Monsieur le Président,

Le Crime transnational organisé ne peut être appréhendé par un Etat seul, voir même dans ce monde de plus en plus mondialisé, par une région seule. Il est manifeste que la sécurité est indivisible. Une action solidaire et concertée est ainsi primordiale entre les Etats de la région ouest africaine et sahélienne pour appréhender de manière durable les défis multiples posés par cette menace.

Ce défi doit également être abordé dans un cadre plus élargi à travers des mécanismes transrégionaux de coopération et de coordination ainsi qu’à travers l’établissement de passerelles notamment entre les sous-régions ouest, centre et nord africaines.

En ce qui concerne la lutte contre le trafic transatlantique de drogues, une coopération élargie basée sur le principe de responsabilité partagée s’avère indispensable pour trouver des solutions concrètes et à long terme à cette menace qui s’enracine, de jour en jour, dans la région.

A cet égard, il est important de soutenir et de renforcer les mécanismes africains sous- régionaux ou transrégionaux existants et il est aussi pressant que ces initiatives passent, au
plus vite, à la phase de mise en œuvre. La communauté internationale est appelée à soutenir davantage les pays de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel dans la mise en œuvre de leurs Plans d’Actions.

Nous saluons aussi, les mécanismes tricontinentaux à l’instar de l’Initiative du G8 sur la lutte contre le trafic transatlantique de cocaïne et le Symposium transatlantique sur les réseaux transnationaux illicites. Ces mécanismes de dialogue et de coopération ont un rôle très utile à jouer dans la lutte contre le trafic transatlantique de drogues qui représente l’une des menaces majeures pour l’Afrique de l’Ouest et la région du Sahel.

Le partage d’expertises et du savoir faire dans le domaine des actions de lutte contre la criminalité transnationale organisée demeure le moyen le plus efficace pour lutter contre ce fléau. Au niveau des pays africains riverains de l’Atlantique, de nombreux pays ont marqué leur disponibilité à partager avec les autres membres de l’Initiative Africaine Atlantique leurs différentes expériences, expertises ou savoir faire dans le cadre de la solidarité africaine et Sud Sud. Cette approche devrait être reproduite, aussi bien, au niveau Nord-Sud quedans le cadre d’une coopération triangulaire.

Il va sans dire que toute action visant à combattre le crime transnational organisé nécessite l’examen concerté des causes profondes qui favorisent le développement de ce fléau qui sont la faiblesse de l’Etat de droit, le manque de coopération judiciaire et policière entre Etats voisins, le manque de capacités ainsi que les défis socio-économiques qui pèsent sur certains pays de la région.

En ce qui concerne ces derniers points, nous saluons le rôle précieux que jouent les Nations Unies, particulièrement l’ONUDC, ainsi que les partenaires internationaux pour venir en assistance aux Etats de la région dans ce domaine. Cette coopération mérite d’être renforcée davantage selon une approche cohérente, coordonnée et concertée, abordant, à la fois, et de manière équilibrée, les aspects sécuritaires et développementaux.

A cet égard, on ne saurait trop insister sur l’importance centrale du développement, dans toutes ses dimensions socio-économiques et humaines, ainsi que de l’intégration régionale sur la stabilité, la sécurité et la prospérité des Etats. Ce développement multidimensionnel est au cœur du partenariat Sud Sud que Sa Majesté le Roi a toujours prôné et que le Maroc est résolument engagé à continuer de mettre en œuvre dans ses relations de coopération avec l’Afrique.

Par ailleurs, nous appuyons la recommandation présentée dans le rapport de la mission inter agence au Sahel, tendant à développer une approche intégrée des Nations Unies pour la région, abordant de manière globale l’ensemble des défis menaçant la paix, la stabilité et la sécurité, et visant à promouvoir le développement humain de cette région.

Monsieur le Président,

Le crime transnational organisé ne cesse malheureusement de s’adapter aux réponses apportées par les Etats de la région en se perfectionnant et en utilisant des méthodes de plus en plus sophistiquées pour perpétrer et perpétuer ses opérations.

La prompte réactivité et l’engagement solidaire des Etats de la région sont impératifs pour apporter des réponses durables à cette menace. Pour sa part, la communauté internationale, à
travers l’ONU, doit aussi établir des mécanismes d’alerte précoce nécessaire, leur permettant de venir en assistance, si nécessaire et dans les plus brefs délais, aux pays de la région concernés.

Enfin, ma délégation se souscrit pleinement à la Déclaration Présidentielle dont lecture a été faite par son Excellence le Président Faure GNASSIMBE.

média

 

attachment-1 photo-2b conference-youssef-amrani b-20 img_0051 milan-oct-2015 2016-02-12 - Youssef Amrani, Minister in Charge of Mission at the Royal Cabinet of Morocco gesticulates on the conference "The Challenges for Security Services in of Imported Terrorism in Europe" from the Middle East Peace Forum on the Munich Security Conference in Munich, Germany. Photo: MSC/dedimag/Sebastian Widmann upm 23023365664_05464c6a50_o