Le Maroc, pays responsable et doté d’une politique migratoire humaniste - Youssef AmraniYoussef Amrani

Le Maroc, pays responsable et doté d’une politique migratoire humaniste

Le Maroc a réagi de façon responsable en se dotant d’un arsenal juridique et d’une politique migratoire humaniste dans leur philosophie, répondant à une approche globale qui traite de l’ensemble des facettes de ce phénomène, a souligné M. Youssef Amrani, lors de son intervention au  panel « Guerres et Migrations : la Méditerranée et le Proche-Orient », jeudi 5 mars 2015, au siège de l’UNESCO, à Paris.

Etant donné le contexte géostratégique actuel, la nature des relations entre le Maroc et le l’Europe ainsi que la situation humanitaire difficile de cette catégorie de population, je souhaite consacrer principalement mon intervention sur ce qui devrait nous rapprocher plutôt que ce qui nous sépare/divise aujourd’hui :

Je vais donc m’atteler à ce qui rapproche les deux rives de notre « mare nostrum » lien non seulement économique, mais également humain entre le sud de l’Europe et le nord de l’Afrique ;

Mieux appréhender la question migratoire

Au côté de mon ami et collègue Miguel Angel, nous pouvons témoigner, ensemble, des difficultés passées rencontrées par nos deux pays à faire face à des afflux successifs de migrants, aux nombreuses tentatives de centaines de personnes dont de nombreux jeunes et femmes la traversée de la mer méditerranée dans des conditions inhumaines afin de rejoindre « l’eldorado européen » ;

De ces moments difficiles, je ne souhaite retenir que la réussite engrangée à la suite de la mise en place conjointe d’actions concrètes qui ont permis de transformer une situation de crise en un modèle inédit de coopération en Méditerranée ;

En effet, le Maroc avait lancé, en 2006, conjointement avec, l’Espagne le Sénégal et la France, la conférence euro-africaine sur la migration et le développement, dont la vocation première vise à faire de la question migratoire une opportunité plutôt qu’un fardeau pour tous les pays concernés par la chaîne migratoire, qu’ils soient d’origine, de transit ou de destination ;

Ainsi est né le Processus de Rabat : une cinquantaine de pays concernés par cette problématique (d’origine, de transit et de destination) réunis pour adopter, dès 2006, un plan d’action visant à gérer de manière cohérente et efficace les flux migratoires, privilégier la dimension humaine et de développement dans cette gestion et enfin, instaurer un dialogue politique permanent entre les différents acteurs et parties prenantes dans le processus.

Je ne vais pas m’étendre davantage sur cette question car l’Ambassadeur Thiam qui interviendra plus tard, a également pris part, dès le départ, à ce processus, aussi bien à Rabat qu’à Dakar ou encore à Paris ou Madrid ;

Le Maroc, acteur responsable face à ce phénomène

Le Maroc, conscient du rôle crucial d’une prise en charge humaine de la situation de cette population, souvent en détresse a lancé, très tôt, une initiative pour l’élaboration et la mise en place d’une stratégie nationale et d’un plan d’action approprié, d’une politique globale en matière d’immigration ;

Sa Majesté le Roi Mohammed VI a personnellement et directement donné ses Hautes Orientations en vue de concevoir, dans les plus brefs délais, un plan d’action opérationnel du gouvernement, visant à mettre en place « une nouvelle politique migratoire nationale, humaniste dans sa philosophie, globale dans son contenu, responsable dans sa démarche et pionnière au niveau régional » ;

A cet égard, la nouvelle politique migratoire du Maroc prônée par Sa Majesté le Roi, a été pensée dans le respect à la fois des conventions internationales ratifiées par le Royaume et de la nouvelle Constitution. Dans ce sens, elle obéit à quatre objectifs spécifiques, à savoir : faciliter l’intégration des immigrés réguliers, mettre à niveau le cadre réglementaire, mettre en place un cadre institutionnel adapté et gérer les flux migratoires dans le respect des droits de l’Homme.

Avec pour fondement la protection des droits de l’Homme des migrants, le plan d’action qui a été arrêté s’articule autour de 4 grands axes :

Axe 1 : La situation des réfugiés et des demandeurs d’asile qui s’est concrétisé par la régularisation des réfugiés statutaires, reconnus par le HCR. 546 cas ont été régularisés et 1100 sont encore en cours d’étude. Les nationalités les plus représentées sont les ivoiriens, les congolais (RDC), les iraquiens et les palestiniens, dorénavant des syriens. Les femmes représentent 40% et les mineurs 24% du nombre de réfugiés au Maroc ;

Axe 2 : La question des étrangers en situation irrégulière, notamment par la régularisation des étrangers en situation irrégulière, dans le cadre d’une opération exceptionnelle qui a permis de traiter  plus de 27 000 demandes dont plus de la moitié a déjà reçu un avis favorable et quelques 10 000 titres de séjours ont déjà été délivrés. Une commission nationale de recours a également été créée avec le Conseil National des Droits de l’Homme, qui permet aux demandeurs de cartes de séjour de faire appel de toute décision concernant leur situation sur le territoire ;

Axe 3 : L’amélioration du statut des étrangers en situation régulière, notamment par la mise à niveau du cadre juridique et institutionnel relatif à l’immigration, l’asile et de la lutte contre la traite (3 projets de textes de lois sont déjà dans le circuit d’approbation pour une entrée en vigueur prochaine);

Axe 4 : La lutte contre la traite des êtres humains, à travers une action diplomatique, chargée de promouvoir la coopération régionale et internationale en matière migratoire. Dans ce contexte, le Maroc a accueilli plusieurs réunions, conférences internationales et ouvert de nombreux débats sur cette thématique, notamment pour sa prise en compte dans le cadre des Objectifs de Développement du Millénaire, post 2015.

Sa Majesté le Roi a été à l’initiative de l’ « Alliance sur la migration et le Développement » qui encourage la promotion et la protection des droits fondamentaux des migrants et des réfugiés, la consolidation de la synergie entre la migration et le développement et ce, sur la base de la responsabilité partagée, et le renforcement de la coopération entre les Etats de l’espace euro-africain. L’alliance illustre, de nouveau, l’engagement du Royaume à promouvoir une coopération multilatérale rénovée qui soit au service de l’Afrique et de son développement ;

A travers cette démarche, le Maroc va au-delà du simple octroi aux migrants de cartes de séjour et de la facilitation des procédures de régularisation des sans-papiers. Le Royaume inscrit sa politique, tel que voulu par Sa Majesté le Roi, dans le cadre d’un projet social, basé sur la volonté de bâtir une société moderne et démocratique, ayant pour valeur la diversité, l’interaction culturelle et la tolérance ;

C’est dans ce sens que le pays a également mis en place des mesures d’accompagnement en faveur des migrants pour leur permettre une intégration réussie et efficace à la société pour contribuer à la vie sociale marocaine;

Ces mesures comprennent plusieurs volets, notamment, la reconnaissance des migrants de leurs droits civils, économiques, sociaux, culturels et politiques, mais aussi des mesures leur garantissant l’égalité des chances avec les résidents nationaux ;

L’orientation juridique, l’apprentissage de la langue arabe, la formation professionnelle pour les adultes ou encore l’accès aux soins de santé, constituent autant de mesures concrètes qui favoriseront l’insertion sociale des migrants sur le sol marocain ;

Je voudrais conclure en insistant sur l’importance d’une immigration maîtrisée, gérée et non subie, car elle représente une source d’enrichissement culturel et social. Afin de faire converger toutes les forces investies dans le processus vers une meilleure gestion de la question et une intégration plus globale des migrants, il conviendrait de réfléchir, ensemble, sur les 3 points suivants :

1. la prise en charge de la dimension cultuelle pour éviter le repli identitaire, le déni culturel et l’instauration d’un dogmatisme aveugle qui engendre une spirale de la violence difficile à stopper;

2. La maîtrise des flux migratoires par la mise en place d’une approche commune, entre les partenaires du Nord et du Sud. Comment mieux l’adosser aux défis collectifs ? Comment mettre en œuvre des mesures concrètes et mobiliser des ressources tant humaines que matérielles et financières ?

3.La cohérence des initiatives promues par les différents acteurs à l’échelon régional et sous régional. Comment clarifier une démarche consensuelle, notamment avec l’Union Européenne, pour l’adoption d’une position commune ? Notamment en ce qui concerne la portabilité des droits sociaux et la facilitation de la circulation des personnes.

média

 

attachment-1 photo-2b conference-youssef-amrani b-20 img_0051 milan-oct-2015 2016-02-12 - Youssef Amrani, Minister in Charge of Mission at the Royal Cabinet of Morocco gesticulates on the conference "The Challenges for Security Services in of Imported Terrorism in Europe" from the Middle East Peace Forum on the Munich Security Conference in Munich, Germany. Photo: MSC/dedimag/Sebastian Widmann upm 23023365664_05464c6a50_o