« La convergence réglementaire : un vecteur stratégique essentiel pour cristalliser une perspective ambitieuse entre le Maroc et l’Union européenne » - Youssef AmraniYoussef Amrani

« La convergence réglementaire : un vecteur stratégique essentiel pour cristalliser une perspective ambitieuse entre le Maroc et l’Union européenne »

Je tiens à exprimer mes sincères remerciements aux organisateurs de cette rencontre dédiée aux relations Maroc-Union européenne, une thématique qui occupe depuis toujours une place centrale dans l’agenda diplomatique du Maroc, et pour laquelle je me suis beaucoup investi ces dernières années.
En organisant aujourd’hui cette rencontre, l’Association Ribat Al Fath pour le Développement Durable, en partenariat avec la Fondation Konrad Adenauer, interpelle le devenir des relations du Maroc avec l’UE, en mettant l’accent sur un levier et un outil stratégique essentiel pour la réussite du Statut avancé à savoir la convergence réglementaire.

Au-delà de sa nature technique, la convergence réglementaire est un cheminement singulier qui déterminera, à terme, la capacité des relations Maroc-Union européenne à se régénérer en permanence et à créer les conditions propices à un avenir commun dans un environnement régional traversé par de profondes incertitudes et turbulences.

Etant donné l’ampleur et l’importance de ce sujet, j’essaierai d’être à la fois bref et complet, en évitant de revenir sur l’historique et les réalisations déjà bien connu de cette relation privilégiée liant le Maroc et l’Union européenne.

Depuis l’adoption, en octobre 2008, du document conjoint Maroc-UE relatif à l’octroi d’un Statut Avancé pour le Royaume, nous oeuvrons, dans une logique de proximité optimale et réfléchie, au renforcement de notre ancrage au marché européen en construisant les bases d’un espace économique commun, objectif stratégique arrêté  par Sa Majesté le Roi, Que Dieu L’Assiste.

Ceci se traduit, aujourd’hui, par un renforcement continu de la concertation politique, un rapprochement graduel de la législation marocaine avec l’acquis communautaire, la conclusion prochaine d’un accord de libre échange complet et approfondi, ainsi que par l’élargissement du spectre de l’association par une dynamisation de la coopération sectorielle.

En privilégiant une telle approche, le Maroc et l’Union européenne se sont fixés pour objectif commun d’opérer un véritable saut générationnel dans la conception et la philosophie même de leurs relations  multidimensionnelles, en allant au-delà d’une simple « logique libre-échangiste », pour promouvoir un transfert de politiques publiques européennes vers le Maroc ; synonyme d’une une intégration plus forte des structures politique, économique et sociale marocaines à celles de l’UE, voir demain, d’une adhésion sui generis, aux « quatre libertés » formant l’armature du marché intérieur européen.

Pour servir ce dessein, le Maroc et l’Union européenne ont choisi de placer la convergence réglementaire au cœur de leur action commune pour faire émerger, à terme, un espace homogène et complémentaire régi par des principes et des règles uniformes, renforçant, ainsi, la visibilité et la lisibilité  que se doit d’offrir tout espace compétitif dans un monde concurrentiel globalisé.

En disant cela, il doit être clair que la convergence réglementaire n’est qu’un moyen et ne doit pas être une fin soi.

En effet, au-delà de sa portée technique, la convergence réglementaire doit être appréhendée comme un vecteur et un véhicule essentiel pour cristalliser une perspective ambitieuse que le Maroc aspire légitimement à avoir dans ses relations avec l’Union européenne.

En souscrivant volontairement et consciemment aux principes de la convergence réglementaire, le Maroc ambitionne de saisir l’opportunité unique qu’offre les perspectives réelles de l’intégration dans un grand ensemble économique commun qu’est l’Union européenne.

En effet, nous estimons que le comblement de l’écart réglementaire agira comme une force motrice pour améliorer la compétitivité globale de l’économie marocaine en consolidant son caractère concurrentiel, en améliorant la protection de nos opérateurs, en renforçant son attractivité, réglementaire et institutionnelle, au profit des investisseurs étrangers et en développant sa dimension durable sur les plans humains et environnemental.

La convergence réglementaire constitue, également  une occasion pour le Maroc de consolider son processus de modernisation de ses structures réglementaires et institutionnelles pour  libérer ses forces productives, renforcer son positionnement et ses capacités internes, et asseoir durablement la singularité du modèle marocain, en adéquation avec les profondes réformes impulsées par Sa Majesté le Roi, Que Dieu L’Assiste.

Ce vaste chantier de réformes ambitieuses est de nature irréversible et constitue un choix stratégique qui va au-delà de tout clivage politique.

Enumérer les avantages de la convergence réglementaire ne doit pas nous faire oublier  que la réussite de cette entreprise commune est porteuse de nombreux défis.

En effet, la convergence réglementaire n’est pas une simple opération technique requérant une ingénierie normative ou institutionnelle. Elle constitue, avant tout, une véritable transposition de systèmes, de valeurs, de modes de pensées qu‘il s’agira de soumettre à des logiques et des réalités spécifiques au Maroc pour assurer une durabilité de l’action et l’acceptabilité des réformes.

De plus, nous devons être conscient que l’ampleur de la tâche est considérable même s’il s’agit d’une reprise partielle de l’acquis communautaire. L’acquis communautaire, fait de milliers de règles et de normes, n’est pas transposable en entier et tout ce qui est transposable ne doit pas être transposé tout de suite.

Il nous faut déterminer ce qu’il faut transposer, quand il faudra le faire et comment le faire pour assurer une intégration pleine et effective aux structures du marché intérieur.

La richesse et les imbrications multiples de l’acquis communautaire exigent que la progressivité soit la norme et la valeur cardinale de notre démarche.

C’est pour cela que nous opterons, avec l’Union européenne, dans le cadre d’un Programme national de convergence réglementaire, pour l’adoption d’une approche graduelle, sectorielle et séquencée, voir « une convergence en douceur », pour manœuvrer entre deux préoccupations essentielles : la nécessité, d’une part, de tenir compte de notre capacité d’absorption de l’acquis et, d’autre part, de créer de subtiles synergies entre le rapprochement réglementaire et les politiques publiques marocaines pour assurer une cohérence globale des chantiers de réforme.

C’est l’esprit qui nous guide dans les négociations récemment lancées pour la conclusion d’un accord de libre échange complet et approfondi que je considère comme un puissant vecteur pour assurer la phase de transition nous séparant de la reprise de l’acquis communautaire.

Cette accord, premier du genre en méditerranée, permettra de consolider davantage l’accord d’association actuellement en vigueur, en couvrant une large gamme de domaines réglementaires et de nombreuses dimensions à l’instar des marchés publics, la facilitation du commerce, les mesures sanitaires et phytosanitaires, la défense commerciale, les obstacles techniques au commerce, la propriété intellectuelle, ou encore la concurrence.

Autre manifestation de cette ambition commune, je signalerai brièvement la mise en place du programme « Réussir le Statut Avancé », véhicule financé doté d’un budget de 180 millions d’euros pour la période 2011-2013, qui, permettra outre un appui sectoriel, de financer, à terme, le processus de convergence à hauteur de 89 millions d’euros.

Par ailleurs, il s’agira pour nous de faire de cette convergence réglementaire « une exigence pour tous ». D’où la nécessité de renforcer la coordination effective  et l’esprit d’appropriation commune auprès de tous les acteurs marocains concernés : gouvernement, parlement, société civile, administration, et demain, les structures régionales dans le cadre du vaste chantier de régionalisation pour lequel le Royaume a opté dans sa nouvelle loi fondamentale.

De plus, la réussite de la convergence réglementaire exigera un effort soutenu pour consolider les réformes lancées par le gouvernement en vue de renforcer les capacités administratives du Maroc, la qualification des ressources humaines et leur aptitude à s’approprier de nouveaux outils venus d’Europe.

Enfin, le succès de la convergence réglementaire est intimement lié à la capacité de l’Union européenne d’assumer pleinement sa responsabilité vis-à-vis du Maroc, à l’instar du rôle historique joué pour assurer les transitions des pays de l’Est. En disant cela je ne sous-estime pas les difficultés économiques que connaît, aujourd’hui, l’Union européenne mais j’estime que l’Europe doit se doter d’une ambition financière conséquente pour accompagner durablement le Maroc sur le chemin de son intégration effective au marché intérieur communautaire.

 

Je vous remercie

média

 

attachment-1 photo-2b conference-youssef-amrani b-20 img_0051 milan-oct-2015 2016-02-12 - Youssef Amrani, Minister in Charge of Mission at the Royal Cabinet of Morocco gesticulates on the conference "The Challenges for Security Services in of Imported Terrorism in Europe" from the Middle East Peace Forum on the Munich Security Conference in Munich, Germany. Photo: MSC/dedimag/Sebastian Widmann upm 23023365664_05464c6a50_o