51e Conférence de Munich - Youssef AmraniYoussef Amrani

51e Conférence de Munich

Munich, 6-8 février 2015. Lors de sa participation à la 51ème édition de la Conférence de Munich , Youssef Armani a décliné ses remarques au sujet de la Stratégie Énergétique du Maroc, ainsi qu’au sujet de la Stratégie de lutte contre la corruption:Aujourd’hui, le monde fait face à des enjeux et défis majeurs en matière de sécurité énergétique. Les récentes évolutions géopolitiques mondiales qui ont marqué les marchés énergétiques, en l’occurrence la volatilité et l’instabilité des cours, les changements climatiques, constituent autant de facteurs qui ont profondément transformé le paysage de l’énergie au niveau mondial. Ces transformations majeures mettent l’accent sur la nécessité pour les pays dépendants des ressources énergétiques extérieures de repenser leurs politiques visant la sécurisation de leur approvisionnement énergétique et de procéder à leur renforcement, à travers la mise en place de nouveaux outils à cet effet ;

Depuis plusieurs décennies, les politiques liées à la sécurité énergétique par exemple en Europe, été principalement conçues au niveau national, sans tenir compte de l’interdépendance avec les pays du voisinage. Or actuellement, la sécurité énergétique ne peut être garantie qu’à travers une approche collective, une plus large coopération au niveau européen et régionale, mais aussi, à travers le développement de réseaux et d’ouverture des marchés énergétiques dans le cadre d’une action extérieure plus cohérente ;

1. Quelles perspectives pour une intégration régionale énergétique en Méditerranée et au Maghreb ?

La mise en place d’une coopération énergétique entre l’Union Européenne et ses voisins méditerranéens est fondamentale. Les pays de la région euro-méditerranéenne disposent en effet, d’atouts à la fois uniques et complémentaires, à savoir, un savoir-faire reconnu et une technologie de pointe du côté de la rive Nord et un important potentiel en énergies renouvelables et en gisements en hydrocarbures du côté de la rive Sud ;

Pour le Royaume, l’ensemble des pays doivent mettre à profit, dans le secteur énergétique, les possibilités de coopération bilatérales et multilatérales entre les deux rives. C’est dans cet esprit que le Royaume, grâce à sa position géographique et sa volonté politique, poursuit ses efforts afin de promouvoir son intégration régionale, à travers la consolidation du rôle clé qui lui incombe dans l’espace euro-méditerranéen, mais aussi à travers le renforcement des interconnexions électriques et gazières avec les pays voisins ;

Toutefois, le Maroc estime, que cet objectif ne peut être pleinement réalisable, qu’à travers la réalisation d’une intégration énergétique maghrébine effective. C’est dans cette optique, que le Royaume, l’Algérie et la Tunisie, travaillent d’ores et déjà conjointement, sur le projet d’intégration énergétique avec l’Union Européenne, à travers la mise en place de réformes visant l’harmonisation leurs cadres législatifs en vue d’une intégration progressive des marchés énergétiques, notamment de l’électricité, du Maroc, de l’Algérie et de la Tunisie au marché de l’UE.

2. Une stratégie nationale énergétique durable, garante de la sécurisation d’approvisionnement énergétique du pays :

Le potentiel du Maroc en matière d’énergie, notamment solaire et éolienne représente une ressource énergétique très importante (plus de 5 kWh/m2/jour en moyenne et plus de 3 000 heures d’ensoleillement par an pour le solaire et un potentiel exploitable estimé à 25000 MW pour l’éolien). Fort de ces atouts exceptionnels, le Royaume a décidé de se doter, en novembre 2009, d’un Plan solaire marocain (PSM), dévoilé à Ouarzazate, suivi de la création de la société Moroccan Agency for Solar Energy (MASEN), en janvier 2010, suivi de la mise en œuvre d’une stratégie énergétique nationale prometteuse ;

Le Royaume s’est stratégiquement engagé dans le développement des énergies renouvelables en général et de l’énergie solaire en particulier. Ces énergies constituent un volet capital pour le pays, au regard du rôle fondamental qu’elles jouent dans la dynamisation du développement économique et social du pays. Aussi, le Royaume, sous l’impulsion Royale, a mis en place une stratégie énergétique nationale à long terme, favorable au développement des énergies renouvelables et issue de larges concertations inclusives. Le choix du pays pour une transition énergétique vers le durable, fait qu’il dispose d’un cadre des plus avancée dans la région, particulièrement pour le développement de projets énergétiques :

La stratégie du Royaume vise quatre objectifs fondamentaux :

  • La sécurité d’approvisionnement énergétique du pays : avec pour objectif de réduire la dépendance énergétique du pays à 85% en 2025, à travers notamment, la diversification des sources d’énergie ;
  • La généralisation de l’accès à l’énergie à des prix équilibrés: grâce à une meilleure maîtrise des coûts futurs des services énergétiques ;
  • La mobilisation des ressources nationales renouvelables : en vue d’économiser les ressources énergétiques, d’en assurer la conservation et d’en rationaliser la consommation, préalable nécessaire au développement durable du pays. L’objectif étant de faire passer la part des énergies renouvelables de 5,85 % en 2013 à 14,24 % en 2025 ;
  • La préservation de l’environnement : en amoindrissant les émissions de gaz à effet de serre.

Elle définit par ailleurs quatre grandes orientations :

  • La diversification et optimisation de choix technologiques fiables et compétitifs ;
  • La mobilisation des ressources nationales via le développement des énergies renouvelables;
  • La promotion de l’efficacité énergétique, élément central dans la stratégie nationale ;
  • L’intégration du Royaume dans le système énergétique régionale.

Ces choix stratégiques sont motivé par l’accroissement de la demande nationale en énergie primaire, qui a augmenté de près de 5% durant les dernières années, suite à la généralisation de l’électrification rurale, mais aussi par le dynamisme de l’économie et de la politique des grands chantiers en infrastructures (industrie, agriculture, tourisme, logement social…) initiée par le Royaume. Ainsi, parmi les priorités centrales de la stratégie élaborée par le gouvernement marocain, l’augmentation à 42% de la contribution des énergies renouvelables dans la production électrique nationale en 2020, le quadruplement de la demande électrique et la réalisation d’économies à hauteur de 25% à l’horizon 2030 ;

Le Royaume à travers sa stratégie vise également la promotion des technologies prometteuses de valorisation des ressources énergétiques renouvelables, la consolidation d’un tissu industriel capable d’accompagner les grands projets de développement afin d’en assurer la compétitivité à l’international Enfin, l’innovation dans ce domaine, orientée vers le développement durable, avec son triple objectif d’efficience économique, d’équité sociale et d’équilibre écologique est aussi fondamentale pour le Royaume.

3. Une stratégie qui s’appuie sur des mesures juridiques, institutionnelles et organisationnelles :

D’importantes réformes et mesures au niveau législatif, réglementaire et institutionnel, ont été entreprises par le Royaume, tout comme une expertise nationale a été développée au niveau des institutions publiques et privés en vue d’accélérer la transition énergétique du pays. Outre la transition énergétique, l’accompagnement institutionnel vise également l’offre de nouvelles opportunités aux investisseurs, plus particulièrement dans le secteur de l’énergie solaire thermique, photovoltaïque et éolienne. Il s’agit en l’occurrence du développement industriel, la formation des compétences, la recherche-innovation et le développement local… ;

Actuellement, le pays entame une nouvelle étape de sa stratégie énergétique par le biais d’une nouvelle série de réformes structurantes, visant une ouverture du marché énergétique marocain avec des opportunités d’investissements estimés à près de 36 milliards de dollars pour la période allant de 2014 et 2025. Le plan solaire quant à lui, à travers le Projet de développement intégré Marocain de l’Energie Solaire, vise la mise en place en 2020 d’une capacité de production électrique à partir de l’énergie solaire d’une capacité totale de 2 000 MW sur cinq sites : Ouarzazate, Ain Bni Mathar, Foum Al Oued, Boujdour et Sebkhat Tah. L’énergie solaire représentera 14% de la puissance totale installée au Maroc 2020 et évitera l’émission de 3,7 millions de tonnes de CO² par an. Ce projet également à vocation sociale, emploie près de 1 000 employés, dont 900 Marocains, sur le terrain. En juillet 2010, le programme éolien intégré, articulé autour de 5 parcs éoliens, situés à Tanger, Tétouan, Taza, Tiskrad et Boujdour, assurera 14% de l’électricité produite au Maroc d’ici 2020 ;

Enfin l’institutionnalisation des mécanismes d’efficacité énergétique et le recours aux énergies renouvelables, s’est par ailleurs matérialisée par la création du Fonds de Développement Énergétique (FDE) doté de 1 milliards de dollars ou encore de la Société d’Investissements Énergétiques (SIE) créé pour faciliter la mise en œuvre de la stratégie énergétique nationale.

S’agissant de la Stratégie de lutte contre la corruption du Royaume, Youssef AMRANI a fait part des remarques suivantes:

La corruption est un phénomène complexe et opaque qui constitue un sérieux frein au développement économique et social, porte atteinte aux droits fondamentaux des citoyens, affecte la crédibilité des institutions et la suprématie de l’Etat de droit. Conscient du danger que représente ce phénomène, le Royaume à très tôt manifesté sa volonté politique pour lutter contre la corruption et être ainsi en phase avec les normes et standards internationaux en la matière. Cette volonté s’est d’ailleurs exprimée ouvertement dans plusieurs discours du Souverain, ainsi que dans les déclarations et les programmes des différents gouvernements ;

Engagé sur la voie de la démocratie, de la modernisation, de l’ouverture et de la transparence, le Royaume a fait de la lutte contre la corruption une priorité majeure. A cet égard, le pays a pris un ensemble de mesures visant à moraliser la vie publique, à promouvoir la culture de la transparence et à lutter contre la corruption.

1. La nécessité du renforcement des mesures législatives et institutionnelles en matière de lutte contre la corruption :

Sur le plan national, le Royaume a connu des avancées significatives en matière législatives, institutionnelles, mais aussi  à travers le lancement du chantier de la réforme de la justice. Cette volonté politique s’est en effet traduite dans la nouvelle constitution qui a consacré un chapitre important à la bonne gouvernance, à la constitutionnalisation et au renforcement des instances comme l’Instance Centrale de Prévention de la Corruption, le Conseil de la Concurrence ou encore les organismes de contrôle et d’inspection… ;

Aussi, l’adoption prochaine par le gouvernement de deux projets de loi relatifs au droit à l’information et à l’Instance de probité et de lutte contre la corruption (INPLCC), conforte l’engagement du pays en la matière. Par ailleurs, le Royaume a aussi, récemment finalisé sa stratégie nationale intégrée de lutte contre la corruption, qui touche plusieurs secteurs et qui repose sur approche inclusive et participative, en phase avec les standards internationaux ;

 Ainsi, les efforts du pays dans sa lutte anti-corruption, commencent à porter leurs fruits. Dans le dernier classement mondial établi annuellement par Transparency Interntaional, le Maroc a pu gagner 11 places par rapport à l’année 2012 (où il avait été classé 91ème sur 177), laissant entrevoir des perspectives encourageantes pour le pays ;

Sur le plan international, le Royaume a démontré son engagement à travers, la ratification de la Convention des Nations Unies Contre la Corruption (2007), sa participation aux Conférences des Etats parties à la Convention des Nations Unies contre la Corruption, tenues respectivement à Bali (2007) et Doha (2009) et son choix d’abriter en 2011, la 4ème session de ladite conférence. Ces démarches sont significatives et confirment que le processus de réformes au Maroc est positivement perçu au niveau international, et plus particulièrement au niveau des Nations Unies.

 2. Les fondements de la stratégie nationale anti-corruption :

La stratégie nationale intégrée de lutte contre la corruption a été élaborée selon une approche globale, intégrée et inclusive, articulée autour d’actions cohérentes aussi bien au niveau répressif que préventif. Conforme aux dispositions constitutionnelles et aux standards internationaux, cette stratégie repose sur trois piliers fondamentaux :

  • L’Instance nationale de probité et de lutte contre la corruption (INPLCC) ;
  • Le projet de loi sur le droit à l’information ;
  • La Stratégie nationale intégrée de lutte contre la corruption.

 De même, elle se décline sous quatre volets :

  • La prévention : avec un renforcement des contrôles, la simplification et la dématérialisation des procédures administratives…;
  • L’éducation et la formation : à travers l’intégration des principes d’intégrité, d’éthique et de bonne gouvernance dans les activités et les programmes scolaires et universitaires ;
  • La répression : par l’organisation d’un système judiciaire efficace, la poursuite et le jugement des inculpés ;
  • L’information et la sensibilisation : à travers plusieurs canaux (entreprises, administrations, internet, médias…).

Parallèlement, cette stratégie devrait adopter, après évaluation de l’environnement interne, «une charte nationale anti-corruption», avec une vision, des orientations stratégiques et des plans transversaux d’action à court,  moyen et long terme.

3. Les clés de succès pour une stratégie efficiente et opérationnelle :

Pour le Royaume une stratégie efficiente et pragmatique devrait passer par :

  • Des mécanismes de coordination et d’information appropriés : pour assurer une exécution réussie et le suivi de la stratégie anti-corruption ;
  • Une stratégie mise en œuvre à différents niveaux : par l’ensemble des ministères, des administrations, et des organismes concernés et autres institutions d’intégrité, en plus du rôle que peut jouer la commission anti-corruption ;
  • Le renforcement du rôle de la société civile et des médias : en collaboration avec les institutions gouvernementales afin de développer des solutions participatives.

Dans ce contexte, un environnement propice et une approche intégrée et interdisciplinaire de lutte contre la corruption dans tous les domaines est fondamentale. De même que la qualité institutionnelle des organes anti-corruption et de contrôle et une action citoyenne en la matière restent essentielles.

 

média

 

attachment-1 photo-2b conference-youssef-amrani b-20 img_0051 milan-oct-2015 2016-02-12 - Youssef Amrani, Minister in Charge of Mission at the Royal Cabinet of Morocco gesticulates on the conference "The Challenges for Security Services in of Imported Terrorism in Europe" from the Middle East Peace Forum on the Munich Security Conference in Munich, Germany. Photo: MSC/dedimag/Sebastian Widmann upm 23023365664_05464c6a50_o